« Brevets logiciels » : où en est-on ?

  • #Architecture d'entreprise & applicative

Publié le Mis à jour le Par

Récemment est apparu sur le devant de la scène informatique un débat autour de la brevetabilité des logiciels, débat qui a connu son apogée avec le vote du parlement européen le 24 septembre dernier. Il a depuis quelque peu perdu de sa vivacité ; ce relatif retour au calme doit permettre d’analyser plus sereinement la situation et de faire le point sur des questions qui ne touchent pas uniquement les professionnels du secteur, puisque tous les utilisateurs de logiciels sont potentiellement concernés.

Retour sur les derniers événements

Les brevets au niveau européen sont régis par la Convention sur la délivrance de brevets européens du 5 octobre 1973, qui définit notamment le champ des inventions brevetables (article 52). En particulier, ne sont pas considérées comme telles «les plans, principes et méthodes dans l’exercice d’activités intellectuelles, en matière de jeu ou dans le domaine des activités économiques, ainsi que les programmes d’ordinateurs» (article 52, paragraphe 2c). Mais le paragraphe 3 du même article apporte une nuance à ces restrictions, en stipulant que «les dispositions du paragraphe 2 n’excluent la brevetabilité des éléments énumérés auxdites dispositions que dans la mesure où la demande de brevet européen ou le brevet européen ne concerne que l’un de ces éléments, considéré en tant que tel».

Tout le débat de ces dernières années a porté sur l’expression « en tant que tel » (« as such » dans la version anglaise), certains y voyant une façon de réintégrer les programmes d’ordinateur dans le champ des inventions brevetables. C’est en particulier la position de l’Office européen des brevets (OEB), l’organe de l’Union européenne chargé de l’examen et de la délivrance des brevets : dans une décision de la Chambre de recours technique du 1er juillet 1998, elle rappelle qu’«un produit « programme d’ordinateur » n’est pas exclu de la brevetabilité (…) si sa mise en œuvre sur un ordinateur produit un effet technique supplémentaire, allant au delà des interactions physiques « normales » entre programme (logiciel) et ordinateur (matériel)». Elle aurait déjà accordé pas moins de 30000 brevets pouvant être considérés comme des « brevets logiciels », calquant son attitude sur celle de son homologue américain, le US Patent and trademark office, pour qui les logiciels sont des inventions brevetables au même titre que n’importe quelle invention.

Face à cette situation confuse, la commission européenne a pris le parti de rédiger un texte légiférant les conditions d’application de la convention de Munich, et une proposition de directive a été soumise au vote du parlement européen en septembre dernier. C’est une proposition fortement amendée qui a finalement été adoptée le 24 septembre 2003 par 361 députés pour, 157 contre et 28 abstentions. Si le texte initial se montrait largement favorable à une extension du domaine de la brevetabilité aux inventions mises en œuvre par ordinateur, le texte amendé, lui, limite très fortement le domaine des inventions brevetables : le Parlement européen « a tenu à encadrer strictement la possibilité de breveter les inventions mises en œuvre par ordinateur afin de ne pas aller vers la brevetabilité des logiciels ».

Ce véritable renversement de situation a été salué comme une victoire par les partisans de la non-brevetabilité des logiciels, au rang desquels bon nombre de chercheurs, de PME, ainsi que les partisans des « logiciels libres ». Mais avant d’être adopté définitivement, le texte doit encore être approuvé en l’état par la Commission européenne. Or, d’après certains juristes spécialisés dans la propriété intellectuelle et déçus par le comportement des parlementaires, «l’introduction de ces amendements risque de conduire au retrait de la directive par la Commission européenne. Justement parce qu’ils modifient son application. Mais ce serait plutôt positif, car la réforme des brevets pourrait alors être confiée à des spécialistes du droit des brevets, sans passer par un vote et un débat au Parlement» (cf. http://www.zdnet.fr/actualites/business/0,39020715,39125506,00.htm). Ce qui soulèverait alors un autre problème, autrement plus fondamental : celui de la légitimité et de la compétence à faire des lois d’une assemblée démocratiquement élue pour… faire des lois !

Le débat est donc loin d’être clos aujourd’hui. Et contrairement à ce qu’ont l’air de penser certains juristes, les citoyens ont leur mot à dire et ne doivent pas être tenus à l’écart des affaires publiques sous prétexte qu’ils ne sont pas assez compétents pour se faire une opinion valable. Ce genre de discours ne fait que renforcer le sentiment général d’une dépossession du pouvoir au profit d’une administration centralisée, bien loin des préoccupations réelles de ses administrés… Reste à prouver qu’il est possible d’éclaircir des sujets aussi complexes que le problème de la brevetabilité des logiciels !

Programmes, logiciels, algorithmes… quelques définitions

Avant de rentrer dans le débat du bien fondé ou non de la brevetabilité des logiciels, il convient de savoir de quoi l’on parle exactement. Car si le texte de la Convention de Munich utilise le terme de « programmes d’ordinateur », la récente proposition de directive se réfère quant à elle aux « inventions mises en œuvre par ordinateur ». Et que penser de l’expression largement répandue de « brevet logiciel » ? Quelle différence avec les notions de « code source », d' »algorithme », ou même de « fonctionnalité » ?

Inventions mises en œuvre par ordinateur

Partons de la notion la plus générale et qui englobe toutes les autres : les « inventions mises en œuvre par ordinateur ». Si l’on fait abstraction du caractère « inventif », on peut dire que tout mécanisme, tout procédé, toute solution qui utilise un ordinateur rentre dans cette catégorie. On pourrait bien sûr aller plus loin et se demander ce que l’on trouve derrière le mot « ordinateur » ; afin de ne pas se perdre dans un débat infini, disons qu’un ordinateur est une machine capable d’effectuer des traitements automatisés de données.

Fonctionnalités

Un ordinateur fonctionne à l’aide de logiciels chargés en mémoire donnant accès à un certain nombre de fonctionnalités. Une fonctionnalité peut être assimilée à un service rendu par la machine en réponse à un besoin bien précis. Par exemple, un traitement de texte est un logiciel donnant accès à des fonctionnalités aussi diverses que :

  • permettre à l’utilisateur d’entrer du texte depuis le clavier de l’ordinateur ;
  • afficher le texte à l’écran ;
  • permettre la mise en forme du texte (type et taille des caractères, couleur, etc.) ;
  • effectuer une correction orthographique sur le texte entré ;
  • l’envoyer à une imprimante, etc.

Il serait impossible de répertorier toutes les fonctionnalités offertes par un simple traitement de texte, tellement celles-ci sont nombreuses et variées, allant de la plus simple à la plus sophistiquée.

Programmes et logiciels

La différence entre un logiciel et un programme peut paraître un peu plus subtile. Un programme n’est en fin de compte qu’une séquence d’instructions (ne parle-t-on pas par exemple de programme génétique ?), tandis qu’un logiciel est un ensemble plus complexe alliant programmes et données. Ces données peuvent être très diverses : textes, images, sons, animations, etc.

Un programme peut se présenter sous deux formes :

  • un code source, qui en est une représentation dans un langage compréhensible par l’homme (Java, PHP, C, Fortran, Basic, etc.) ;
  • un code binaire, qui en est une représentation dans un langage compréhensible par la machine ou éventuellement par un autre programme (fichier exécutable, Bytecode Java, etc.)((Il est possible de passer (plus ou moins automatiquement) d’une représentation à une autre. La transformation d’un code source à un code binaire, dite compilation, est habituelle ; celle d’un code binaire à un code source, appelée décompilation, est plus délicate et demande en général beaucoup de patience – mais elle n’est théoriquement pas impossible.)).

Algorithmes

Un algorithme est également une suite d’instructions, mais indépendante d’un langage particulier. Un programme n’est donc que la transcription d’un algorithme dans un certain langage. Cette transcription peut revêtir un nombre infini de formes : on peut avoir des programmes différents – éventuellement écrits dans le même langage – qui mettent en œuvre le même algorithme. Et un seul programme peut avoir recours à plusieurs algorithmes.

Les différentes formes de protection juridique

Droit d’auteur

Un programme, une image, une vidéo, etc., qui sont les composants de base d’un logiciel, sont, en tant qu’œuvres de l’esprit, automatiquement protégés par le droit d’auteur (Code de la propriété intellectuelle, première partie, livre premier). Ce droit limite entre autres la possibilité de reproduction et est, à peu de choses près, équivalent au Copyright américain. Il protège donc l’auteur d’un logiciel contre la copie pure et simple (piratage) de sa création, qui constituerait alors une contrefaçon. Mais il n’interdit pas à quelqu’un de s’inspirer du travail existant et d’en copier toutes les fonctionnalités pour proposer un logiciel équivalent (c’est ce qui a permis par exemple à de nombreux éditeurs concurrents de proposer chacun leur propre version d’outils de bureautique).

Brevet

La protection apportée par le brevet est plus large. Mais avant de voir en quoi elle consiste, revenons brièvement sur les raisons historiques qui ont abouti à sa mise en place.

Pour éviter que leur invention ne soit copiée par un concurrent, pendant longtemps les inventeurs ont usé du secret de fabrication. Mais lorsque l’inventeur disparaissait, il emportait avec lui ses secrets… Autant de perdu pour l’humanité ! Afin de promouvoir la diffusion des inventions, un système de brevets a été progressivement instauré, selon le contrat suivant : l’inventeur rend publique son invention et en échange dispose d’un monopole d’exploitation pendant une durée limitée. Du point de vue de la société dans son ensemble, un monopole est rarement bénéfique, notamment en terme économique : l’absence de concurrence nuit à la qualité du produit et autorise des prix élevés. Mais c’est la contrepartie à accepter pour ne pas perdre définitivement des inventions qui peuvent être autrement plus bénéfiques pour la société. Du point de vue de l’inventeur, cette formule peut être intéressante du moment qu’il estime que le monopole octroyé lui assurera des gains (pas forcément monétaires) supérieurs à ceux escomptés en gardant son invention secrète (ce qui n’est pas toujours chose aisée). Cette garantie d’avoir un retour sur investissement peut aussi le pousser à innover davantage, source d’un gain accru pour la société.

Le point important à retenir de tout ça – et qui est souvent occulté – est que les brevets n’ont pas été instaurés pour protéger les inventeurs, mais pour augmenter le « bien être » de la société dans son ensemble, sous la forme d’un accroissement de la connaissance en général.

Aujourd’hui, le brevet procure à l’inventeur un monopole d’exploitation d’une durée de 20 ans (pour le brevet européen), sous réserve que l’invention remplisse un certain nombre de critères : nouveauté, activité inventive (non évidence), application industrielle et description suffisante.

Le cas des inventions mises en œuvre par ordinateur

Ce n’est pas parce qu’un système est en place qu’il est forcément bon. On ne peut pas étendre (ou entériner) les brevets sur les logiciels uniquement parce que le système existe dans d’autres domaines. Ou parce que les Etats-Unis l’ont fait depuis longtemps. Les circonstances font que la question se pose aujourd’hui en Europe : profitons-en pour réexaminer sur le fond l’utilité pour la société d’une telle protection. Quitte à se rendre compte que les brevets ne répondent plus aujourd’hui aux objectifs qui ont prévalu à leur création. Mais sans aller jusque là, il se peut que l’industrie des logiciels présente des particularités telles que la mise en place d’un tel système se révèlerait plus nuisible que bénéfique.

Que protéger ?

Avant toute chose, il serait pertinent de savoir précisément ce que l’on souhaite protéger : les programmes ? les algorithmes ? les logiciels ?

  • Les programmes (« en tant que tels ») sont déjà protégés par le droit d’auteur. Ils ne sont finalement que la réalisation d’un ou plusieurs algorithmes. Or l’intérêt d’un brevet, c’est de protéger l’idée qu’il y a derrière. Il serait donc plus logique d’accorder un brevet sur un algorithme que sur un programme.
  • Un algorithme, ou plus précisément une méthode mettant en œuvre un algorithme pour réaliser un effet particulier (car un brevet est toujours associé à des revendications), est un bon candidat. Le fait (souvent repris par les opposants à la brevetabilité) qu’un algorithme puisse parfois être réduit à une formule mathématique ne constitue pas une barrière en soi : dans d’autres domaines plus traditionnels, comme la physique par exemple, des brevets sont accordés sur des mécanismes qui ne font qu’exploiter certaines lois de la nature.
  • Quant aux logiciels, les breveter reviendrait à breveter l’ensemble des fonctionnalités qu’il y a derrière, ce qui est proprement inconcevable, vu le nombre de fonctionnalités présentes dans un logiciel.
  • En revanche, breveter une ou des fonctionnalités bien répertoriées (ou plutôt une façon particulière de réaliser cette ou ces fonctionnalités) serait du même ordre que breveter un algorithme (réponse spécifique à un problème posé).

Il apparaît donc que seuls les algorithmes et les fonctionnalités devraient pouvoir prétendre à la brevetabilité, à supposer bien sûr qu’ils en respectent les conditions préalables.

Spécificités du secteur informatique

Examinons à présent quelques spécificités du secteur informatique par rapports aux secteurs plus traditionnels, pour lesquels la protection par brevet est utilisée depuis longtemps. Nous en avons retenu trois : sa jeunesse, son omniprésence dans tous les autres secteurs et son caractère immatériel.

Jeunesse

L’industrie logicielle n’a vraiment démarré que dans les années 70-80, et a connu depuis une évolution très rapide. De nouveaux problèmes surgissent sans cesse, ainsi que des solutions pour les résoudre. Si ces solutions sont par essence « nouvelles », en revanche elles ne sont pas toutes « inventives », loin de là : bien souvent, n’importe quel informaticien confronté au même problème aurait également trouvé la (ou une) solution. Et malheureusement, du fait de l’absence de recul de la part des membres des offices de brevets (qu’ils soient européens ou américains) dans un secteur jeune et en pleine mouvance, nombre de brevets ont été accordés sur de prétendues inventions qui n’en étaient pas vraiment… Mais signalons au passage que ce phénomène n’est pas réservé au seul secteur logiciel ; il suffit pour s’en convaincre de jeter un oeil au brevet US 5,443,036, qui décrit une méthode pour amuser un chat à l’aide d’un pointeur laser !

Omniprésence dans tous les autres secteurs

L’informatique est aujourd’hui présente partout. Elle est largement utilisée dans des milieux aussi différents que la banque, l’agriculture, l’industrie, les services, etc. S’il va de soi qu’une entreprise a tout intérêt à déposer des brevets si elle en a la possibilité (à supposer quand même que le retour sur investissement soit plus élevé que le coût de dépôt du brevet !), il n’est pas aussi sûr que la société, elle, en tire bénéfice au final. En effet, un monopole est d’autant plus intéressant pour celui qui le détient que les applications potentielles sont nombreuses ; mais ne perdons pas de vue qu’il sera aussi d’autant plus néfaste pour la société ! Si bien que lorsque le champ des applications couvre un si grand domaine, il n’est pas évident que le rapport coût/bénéfice pour la société penche toujours du côté des bénéfices. Malheureusement, trop peu d’études ont été menées à ce jour pour avoir une idée précise de la situation réelle…

Caractère immatériel

Cet argument est souvent utilisé tel quel par les opposants aux brevets logiciels, qui estiment qu’on ne peut breveter que des inventions matérielles. Mais y a-t-il une différence fondamentale entre un nouvel algorithme de cryptographie (qui a pu demander des années de recherche et développement) et un nouveau type de serrure, si ce n’est que le premier sera susceptible d’un nombre bien plus grand d’applications que le second ? Le caractère immatériel des logiciels n’est pas un argument en soi.

Toutefois, un certain nombre de conséquences directes de cette immatérialité tendraient à indiquer que l’octroi d’un monopole sur une invention logicielle serait plus nuisible que bénéfique pour la société :

  • Le faible coût des infrastructures (un banal ordinateur personnel) permet à une multitude de développeurs « amateurs » de programmer pendant leur temps libre ; cette communauté n’est pas mue par des intérêts économiques, mais plus par des besoins spécifiques, une passion, un désir de reconnaissance, etc. (cf. livre de E. Raymond : The cathedral and the bazaar). La protection par brevet n’est absolument pas nécessaire pour inciter cette communauté en effervescence à innover en permanence, tant au niveau technique que fonctionnel. Au contraire, elle risquerait de freiner, voire de bloquer son élan par l’octroi de monopoles sur des technologies qui auraient tout de même émergé en l’absence de protection.
  • Contrairement à d’autres secteurs traditionnels, une idée en informatique est en général exploitable très rapidement, et ne nécessite pas des années de mise au point expérimentale. Or la recherche fondamentale est peu disposée à la dépose de brevets : celle-ci n’est pas conforme à l’esprit d’une majorité de chercheurs (qui agissent pour la « beauté de la science ») et surtout elle est incompatible avec le système de publication (les articles sur les technologies brevetées sont généralement refusés).
  • Les temps de développement sont très réduits par rapport aux secteurs traditionnels (le cycle de développement d’un logiciel est de l’odre de 2 ans en moyenne) : un monopole de 20 ans est démesuré au vu des efforts consentis.
  • La société considère comme un progrès pour l’humanité le partage (presque) gratuit des connaissances au niveau planétaire grâce à l’internet. Or cette (presque) gratuité n’a été possible que grâce à la conjonction de deux phénomènes : un coût marginal pratiquement nul de la diffusion et du stockage des informations, allié à l’absence de coûts de licence pour la plupart des technologies utilisées. Ce qui n’aurait pas été le cas si des brevets avaient été déposés par leurs inventeurs : l’absence de brevet a profité à la société dans son ensemble.

Les « brevets logiciels » plus néfastes que bénéfiques ?

Il ressort de ces spécificités de l’industrie logicielle qu’un système de protection des inventions par brevet, s’il n’est pas absurde en soi, ne remplirait pas forcément son objectif initial : apporter un plus grand « bien être » à la société. Certes, les entreprises qui auraient la capacité (financière) de déposer des brevets en tireraient assurément bénéfice ; mais il n’est pas dit que les contraintes acceptées par la société en retour (le monopole octroyé pendant 20 ans) ne surpassent les avantages escomptés (un accroissement global des connaissances).

Conclusion : retour sur le texte voté par le parlement

Le flou juridique actuel autour des brevets sur les inventions mises en œuvre par ordinateur ne profite à personne. Il devenait urgent de statuer au niveau communautaire, et à ce titre l’initiative de la Comission européenne est à saluer. Comme bien souvent, la complexité du problème vient d’une divergence d’intérêts : certaines entreprises mesurent, à juste titre, tout le bénéfice qu’elles pourraient retirer de la protection par brevets ; quelques corps de métier y voient des débouchés supplémentaires (cabinets de conseil ou d’avocats spécialisés, etc.) ; d’autres subissent la pression et l’influence d’acteurs dominants dont la position ne fait pas de doute ; à l’opposé, des entreprises, des laboratoires de recherche, des particuliers, etc., qui n’ont pas grand chose à gagner à l’instauration d’un système de brevets, en soulignent les inconvénients. L’absence de réelle étude sur la question du rapport coûts / bénéfices pour la société rend le débat difficile à trancher.

Le Parlement européen a su garder à l’esprit les objectifs fondamentaux d’un système de protection par brevets, ainsi qu’en témoigne la justification du deuxième amendement : «L’objet de toute législation sur la brevetabilité n’est pas d’assurer un avantage aux titulaires de brevets : cet avantage ne constitue qu’un moyen de stimuler le processus inventif, au bénéfice de la société dans son ensemble». Partant de là, il a essayé de déterminer quelles étaient les inventions mises en œuvre par ordinateur qui pouvaient faire l’objet d’un dépôt de brevet, et celles qui ne le pouvaient pas. Un des critères de brevetabilité est que l’invention doit «apporter une contribution technique à l’état de la technique», ce qui permet d’écarter les algorithmes en tant que tels (dont le champ d’application est quasi-infini), mais pas une méthode mettant en œuvre un algorithme (pour une application particulière). Cette position modérée semble être un bon compromis permettant d’éviter les travers du système américain, tout en ménageant la possibilité aux investisseurs de s’assurer un retour sur investissement sur des technologies vraiment innovantes.

Références complémentaires :